26 Mai 2008

Vernissage de l'exposition de mes élèves le 26 mai 2008 à 18 heures, Gymnase du Bugnon, rue du Bugnon 5, 1005 Lausanne-CH

Peut-être ma dernière exposition au Gymnase du Bugnon où j'enseigne les arts visuels, pour présenter les travaux réalisés par mes élèves. Il y a toujours un petit discours. Pour la première fois cette année je l'ai écrit. Une furieuse envie d'être juste sérieux.

Chers élèves, ce texte vous est dédié, ainsi qu'à toutes celles et ceux qui vous supportent, dans tous les sens du terme...
Lors de mon voyage récent dans le si sublime Japon, et lisant justement les chroniques japonaises de Nicolas Bouvier, j'y découvrais une citation de Paul Eluard:

« Il y a un autre monde, mais il est dans celui-ci ».

Un autre monde . Pas celui que l'on voit, mais celui que l'on pense, que l'on rêve, que l'on désire, que l'on construit. Un autre monde qui n'est pas ailleurs – ce fameux ailleurs qui serait meilleur – mais qui est en nous, en vous. Un monde où tout est possible, parce qu'il est le terrain de l'imaginaire. Un monde dont nous connaissons tous la porte d'entrée, nichée dans un des recoins de notre cerveau.
LA porte.
Une porte attirante autant que crainte. Rentrer, pénétrer ce monde, y vivre les plus folles aventures, mais, surtout, en ressortir, être sauvé.
La voilà, LA crainte. Rester piégé dans l'imaginaire et, tel le « fou » décrit par Andreas Baader, le psychiatre tant attaché à l'art brut, ne pas retrouver la porte. Ne pas pouvoir sortir, respirer « dehors », témoigner des mondes, ceux de l'intérieur et de l'extérieur.
Sortir.
S'en sortir...
Et si nous faisions des images pour nous en sortir. Vivre ou survivre, s'accomoder de notre rapport au monde en créant notre propre monde, à nous, rien qu'à nous.
Pas à soi, mais à nous. Car il est terrain d'échange, d'élaboration d'un dialogue, de rencontres.
Tu me regardes, je te regarde, que se passe–t–il entre nous?
Qui peut encore prétendre qu'il est facile de faire des images, alors qu'elles sont à bout touchant avec nos tourments.
S'en sortir.
Et si c'était pour y voir plus clair. Faire des images pour y voir enfin quelque chose.
Philippe Jaccottet écrivait récemment:
« Dans ce brouillard où je me perdais, moi-même réduit à l'état de piètre fantôme, un beau jour, j'ai vu de nouveau briller comme des gouttes d'eau irisées, des plus belles couleurs de ce monde. »